le 4 avril 2024
Les
aveugles et malvoyants pourront bientôt s’équiper, grâce à Artha, d’un
dispositif technologique inédit leur permettant de mieux percevoir leur
environnement. L’idée a germé en 2017. À l’époque, sous le nom de 6e Sens,
l’objectif était d’utiliser le sens du toucher pour aider les déficients
visuels à gagner en autonomie. Une idée qui a séduit le jury de la Fondation
Sopra Steria – Institut de France, au point que le projet a été lauréat du Prix
Entreprendre pour Demain en 2018.
Depuis, le projet a fait du chemin. « Nous avons créé notre société, recruté, procédé à plusieurs levées de fonds, retravaillé en profondeur le dispositif et nous nous apprêtons maintenant à mettre le produit sur le marché d’ici 6 mois. » Rémi du Chalard, cofondateur de Artha, se remémore tout le chemin parcouru en cinq ans. « Il a d’abord fallu prouver que notre idée de substitution sensorielle était possible. Nous avons fait un premier prototype. Puis nous avons testé cela dans un monde virtuel, ensuite dans des conditions réelles puis il a fallu améliorer les performances et enfin miniaturiser l’appareil pour que ce soit un dispositif réellement nomade. » Un appareil deux-en-un pour gagner en autonomie Concrètement, le dispositif comporte deux éléments. D’un côté une caméra de reconnaissance 3D qui vient se clipser sur n’importe quel type de monture de lunettes. Celle-ci est ensuite reliée par un fil à unesorte de ceinture lombaire. Il s’agit en réalité d’une ceinture haptique, c’est-à-dire qu’elle envoie de petites impulsions, comme des petits picots, à la personne qui la porte. Quel message est envoyé ? « La caméra filme l’environnement en temps réel et envoie ces informations au ‘moteur’ du dispositif qui se charge, à l’aidede l’intelligence artificielle, d’analyser les obstacles, personnes, etc. Ces images sont donc interprétées et restituées sous la forme d’impulsions que le cerveau est capable de comprendre », explique Rémi du Chalard.
artha
Cette
partie du dispositif se clipse sur n’importe quelle paire de lunettes.
Crédit : Artha.
Les
bénéfices sont immédiats même s’il faut un peu de temps pour que le cerveau
apprenne à interpréter les retours haptiques pour les traduire et comprendre
les formes autour de soi. « En 10 minutes, une personne déficiente
visuelle est capable de se déplacer seule grâce à notre système. En 1 à 2
heures, elle comprend déjà un certainnombre d’objets, comme une table, un être
humain… L’apprentissage continue ensuite de manière permanente. Quand il est
bien maîtrisé, une personnepeut identifier un individu devant elle qui lui tend
la main pour la serrer, par exemple », ajoute Rémi du Chalard. En outre,
l’appareil est aussi capable d’identifier du texte et de le lire à voix haute
via un haut-parleur intégré. Enfin, la société annonce pour l’instant une
autonomie d’une journée.
ceinture
artha
Cette
sorte de ceinture lombaire récupère en temps réel les informations filmées pour
les transformer en signaux haptiques. Crédit : Artha.
Un
vrai défi technologique pour Artha, une innovation unique au monde Il y a
énormément de transformation entre l’image filmée et les retours haptiques dans
la ceinture. L’équipe d’Artha a découvert un grand nombre de choses sur le
fonctionnement du cerveau et la façon dont il interprète ce que nous voyons. Au
point de faire profondément évoluer le concept jusqu’à la version finalisée
bientôt commercialisée. « Nous nous sommes par exemple aperçus que le plus
important pour nos utilisateurs, ce n’est pas la qualité des formes
représentées maisla vitesse d’affichage des informations retransmises. Nous
‘affichons’ 500 images par seconde, ce qui est bien plus qu’un écran de gamer.
Avec le toucher, on perçoit des informations beaucoup plus vite », affirme
lecofondateur d’Artha.
Ce
dispositif, qui vient en complément de la canne blanche et/ou du chien
guide, est unique au monde dans son fonctionnement. Commercialisé à 3 000
euros en pré-commande, son remboursement varie en fonction des profils des
déficients visuels, de leur situation et de leur domiciliation. La vente se
fera via des distributeurs spécialiséset directement sur leur site internet.
Artha a aussi sécurisé une commande de l’INJA (l’Institut national des
jeunes aveugles Louis Braille) qui va équiper l’ensemble de ses élèves, du
primaire au lycée.
Pour
les déficients visuels, cette innovation pourrait bien se révéler cruciale dans
leurs quotidien. « Si cela peut permettre de faire le ménage, faire ses
courses, se laver et s’habiller sans aide externe, ou si cela peut éviter à un
ado d’être accompagné à l’école tous les jours par un de ses parents, ce sera
un vrai succès », espèreRémi du Chalard.
Un
écosystème très soudé autour du projet Artha Si Artha est une petite équipe
(5-6 personnes), l’entreprise peut compter sur tout un écosystème très
enthousiaste en faveur du projet.
« Une
vingtaine de business angles sont venus se joindre à l’aventure au fil du
temps, dont deux anciens de la Fondation Sopra Steria – Institut de France.
Alain Salmon était dans le jury en 2018 quand nous avons été lauréats du Prix
Entreprendre pour Demain. Il a tout de suite cru en notre projet et est devenue
notre parrain pour nous accompagner au fil de l’eau. Il a même fini par
investir dans notre société, tout comme Raoul Gilard [directeur industriel
d’agence pour Sopra Steria Group, NDLR] », révèle le président d’Artha.
En
outre, des parents d’enfants déficients visuels se montrenttrès présents pour
soutenir le projet. Ainsi, Artha s’est déplacé récemment à Dubaï en vue d’un
accord commercial pour la région. « Une mère a fait le déplacement avec
nous pour venir donner son point de vue. Nous avons un orthoptiste qui nous a
accompagnés à Dublin pour présenter le dispositif à une école irlandaise de
malvoyants et non-voyants. » Preuve s’il en est que le projet est
accueilli avec un réel enthousiasme par la communauté.
Article réalisé avec le soutien de la Fondation Sopra Steria-Institut de France.
Vincent Hoefman #cecitroc-infos!
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